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15 novembre 2021 1 15 /11 /novembre /2021 15:15
La dualité de la littérature policière...
La dualité de la littérature policière...
La dualité de la littérature policière...

"Car il y a plus dans le roman de Jean-Michel Lecocq que le nécessaire suspense", a écrit un collègue et ami, auteur de grand talent, après avoir lu Le squelette de Rimbaud. On ne pouvait me faire plus beau compliment. En écrivant cela, il évoque la dualité qui existe en littérature entre, d'un côté, les amateurs de polars trépidants dans lesquels les enquêteurs n'ont pas le temps de souffler et où les évènements se précipitent, en s'entrechoquant à chaque page, où seule compte l'enquête proprement dite menée rondement et, de l'autre, ceux qui préfèrent les intrigues menées selon le rythme paisible d'un enquêteur qui, comme l'écrivait un chroniqueur, baguenaude entre les crimes à la recherche d'indices, sonde les cœurs à la recherche de la vérité et fait goûter aux lecteurs, en même temps qu'il enquête, une multitude de saveurs dont les priverait une enquête menée à la hussarde. On m'a reproché quelquefois de ne pas conduire mes intrigues à cent à l'heure, de m'attarder à ménager des pauses pour faire découvrir aux lecteurs un tas d'à-côtés, d'arrière-plans, de chercher à donner à mes histoires de la profondeur. C'est précisément ce dont je tire une certaine fierté, celle de ne pas me contenter de dérouler une simple procédure judiciaire, de ne pas privilégier l'action en cascade mais d'écrire de véritables romans, comme le faisait, au XIXe siècle, un dénommé Emile Gaboriau dont les premiers cités n'aurait sans doute pas apprécié la littérature. Il me semble que la qualité de l'écriture trouve plus facilement son compte dans la seconde catégorie que dans la première. Moins moderne diront certains sans être véritablement certains de pouvoir définir ce qu'il entendent par là. Car, l'écriture d'un Simenon demeure étonnamment moderne. En cela, au risque de paraître prétentieux, je me reconnais une filiation avec ces grands écrivains, auteurs de romans policiers, que sont Gaboriau, Simenon ou encore Magnan. Et je pourrai en citer bien d'autres. Après, chacun est libre d'avoir ses préférences.

 

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4 novembre 2021 4 04 /11 /novembre /2021 21:19

Un de mes collègues, après avoir lu "Un charmant petit village", a porté sur ce roman ce jugement flatteur : " C'est du Simenon". 

Comme Maigret, Payardelle ne porte jamais d'arme. Comme le héros de Simenon, il mène des enquêtes en général complexes, voire compliquées mais suffisamment paisibles pour lui éviter de "défourailler" à tout va. Et, pourtant, dans "Trier les morts", il se met en danger, il frôle même la mort. Les conséquences de cette péripétie ont eu une importance déterminante pour le décor de l'enquête suivante, celle qui pourrait paraître en 2022. J'ai eu l'audace de faire courir des risques à Payardelle mais, qu'on se rassure : je ne caresse pas encore l'idée de lui réserver un sort funeste à l'image de ce qu'a fait Henning Mankell de son héros, Wallander.

"Trier les morts", c'est l'histoire d'une traque, le récit de la poursuite d'un homme insaisissable, un modeleur de génie qui réalise ses créations en résine à partir d'ossements humains et les écoule sur les marchés artisanaux. Mais quelle ne sera pas la surprise pour les enquêteurs, Payardelle en tête, de découvrir que, derrière ce personnage qu'on tient pour un pervers et pour un coupable idéal, se cache un prédateur encore plus redoutable.

 

 

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17 octobre 2021 7 17 /10 /octobre /2021 10:03

Après « No problemo » dont la lecture m’avait emballé, voici une nouvelle pépite signée Emmanuel Varle. Elle s’intitule « En cavale » et vous propulse d’entrée de jeu dans un univers hors normes et qui, pourtant, correspond à une réalité de notre société. Xavier, un policier, viré pour une menue entorse à l’étique professionnelle qui l’a entraîné ensuite à devenir complice d’un dealer, part en cavale et trouve refuge dans la maison du frère d’un ami, ancien truand notoire, au milieu de la forêt et à proximité d’un camp de marginaux sur lequel règnent en maîtres absolus une vieille aristocrate friquée et végane et son amant, un ancien braqueur au tempérament agressif. Xavier va s’intégrer à cette faune disparate et haute en couleurs. Mais le danger rôde à l’extérieur : la police d’abord qui le pourchasse mais aussi de dangereux gitans qui ont un compte à régler avec l’homme qui l’abrite. Sans compter avec tous ces marginaux aussi barges les uns que les autres et dont il ne peut pas être absolument sûr de la loyauté.

C’est le genre de roman qu’on ne peut lâcher tant il est prenant. Il y a du rythme et celui-ci est servi par un style nerveux et une écriture adaptée au sujet. On n’imagine pas les lieux et les personnages on les voit comme si on y était. On se demande comment tout cet imbroglio va s’achever. Eh bien, on n’est pas déçu par le dénouement qui maintient l’action et les surprises jusqu’à la dernière page.

En cavale, de Emmanuel VARLE, Editions Lajouanie, Coll. Poche, 230 pages, septembre 2021, 9,90 €.

En cavale de Emmanuel Varle (editionslajouanie.com)

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14 octobre 2021 4 14 /10 /octobre /2021 19:06
Rodin, Goujon, et bien d'autres noms de sculpteurs dont un certain Jules Talrich, modeleur de génie du XIXe siècle, servent de patronymes à ce camelot inconnu qui, sur le marché de Noël de Draguignan, présente ses créations en résine plus criantes de vérité que celles du musée Grévin. Des têtes de personnages célèbres et des pieds en guise de serre-livres, des avant-bras en guise de gratte-dos. Ses oeuvres d'un goût douteux mais brillamment réalisées ont du succès. Jusqu'au jour où, l'une d'elles ayant été brisée à cause de la maladresse d'une femme de ménage, un médecin-légiste se rend compte qu'elles contiennent de véritables os humains. Désormais, il faut retrouver ce type afin de connaître l'origine de ces ossements et ainsi de les dater, d'identifier leurs propriétaires et de découvrir la cause de leur décès. Mais, le modeleur est une véritable anguille qui ne laisse aucune trace derrière lui, seulement des indices qui sont sans doute autant de fausses pistes. Le commissaire Théo Payardelle, ses habituels comparses et un détective, aidés par des scientifiques du CNRS vont finir par mettre la main sur lui et parvenir à identifier ces ossements. Ils ont bouclé l'enquête. Du moins, le croient-ils. Mais ils ne sont pas au bout de leurs surprises. Et celles-ci sont de taille. Payardelle qui balance entre un sentiment d'horreur et la curiosité que suscite en lui cet étrange artiste, va finir par se mettre en danger.
"Trier les morts" peut réserver d'incroyables surprises !

 

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24 août 2021 2 24 /08 /août /2021 09:25

Quel plaisir de retrouver le trio magique que forment Léanne, Elodie et Vanessa, les trois personnages fétiches de Pierre Pouchairet !

 Dans « Le pont du Diable », elles font encore feu de tout bois. Trois jeunes femmes attachantes dont la personnalité séduit le lecteur en même temps qu’elles entretiennent le suspense au fil d’une enquête passionnante. Cette fois, il est question de réfugiés afghans qu’on retrouve morts dans un camion frigorifique quelque part en Bretagne. Toutefois, un enfant a réussi à s’échapper et à survivre au massacre. Car il s’agit bien d’assassinats. Qui est derrière cette horreur ? L’enfant rescapé cache à n’en pas douter des choses. La commandant Léanne Valori parviendra-t-elle à faire la lumière sur cette affaire ? Pierre Pouchairet met au service de son talent de romancier son expérience personnelle puisque, en qualité d’officier de police attaché à l’ambassade de France à Kaboul, il a baroudé en Afghanistan. Au vu de la situation actuelle, on constate que certains de ses propos sont prémonitoires. Les suspects se succèdent au rythme des fausses pistes. 418 pages de plaisir, un polar qui, au-delà d’un suspense haletant, met une nouvelle fois en valeur cette Bretagne à laquelle l’auteur est tellement attaché. Une lecture qui m’a permis, par ailleurs, de ne pas voir le temps passer au cours de mon hospitalisation. J’attends le prochain opus avec impatience.

Le pont du Diable, de Pierre Pouchairet, éditions du Palémon, juin 2021, 418 pages, 10 €.

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30 juin 2021 3 30 /06 /juin /2021 08:18

"Un charmant petit village", paru en 2017, relatait une intrigue policière dans un petit village du Haut-Var.  Il inaugurait ma série de polars aux éditions Lajouanie. Ce fut un mini-best seller. Il a connu deux réimpressions, donc trois éditions, et a conquis, en version papier comme en téléchargements, quelques milliers de lecteurs; De facto, il a entraîné dans son sillage le succès des trois suivants :

. Le squelette de Rimbaud : une fantaisie policière centrée sur la disparition du squelette de Rimbaud dans le cimetière de Charleville-Mézières. Un vieux juge atypique accompagné d'un jeune policier vont mettre sens dessus dessous le département des Ardennes pour retrouver les restes du poète.

. La caresse des orties : mi-polar, mi-roman de terroir. La commissaire Payardelle retourne dans les Ardennes, sa région natale, pour faire la fête et oublier qu'il approche de son 50ème anniversaire. Mais, quand on retrouve le pays de sa jeunesse, le passé a toutes les chances de resurgir. Et ce passé va remonter à la surface pour l'entraîner dans une enquête complexe. Une sombre histoire de famille et une occasion de replonger dans la jeunesse ardennaise du commissaire..

. Disparitions : Un touriste niçois disparaît au cours d'un voyage organisé en Arménie. En Ecosse, c'est un étudiant toulonnais qui se volatilise. A priori, aucun lien entre ces deux affaires. Et pourtant... Le commissaire Payardelle part en Ecosse à la demande de Scotland Yard tandis que son ancienne adjointe, Marthe Sénard, part en Arménie pour épauler la police locale. Par quel mystère ces deux enquêtes vont-elle se rejoindre en Provence ?

. Le prochain, à paraître en octobre 2021, intitulé " Trier les morts", verra le commissaire Payardelle mener une chasse à l'homme à la recherche d'un modeleur qui sculpte ses oeuvres à partir d'ossements humains. Un final à la "Jean-Christophe Grangé". 

 

 

 

 

 

 

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28 avril 2021 3 28 /04 /avril /2021 07:15

Voilà un polar et, plus largement un roman, original et passionnant. Imaginez un univers où se confondent personnages réels et personnages imaginaires. Imaginez que tous ces personnages sont à la fois des originaux et des doublures avec un pied dans la réalité et l’autre dans l’imaginaire. Imaginez tous les interprètes d’un metteur en scène se retrouvant sous les traits de leurs personnages réunis autour du réalisateur. Pour terminer, imaginez que cet univers est celui de l’œuvre de Hergé. Tous ceux qui ont gravité autour de Tintin pour le meilleur et pour le pire se trouvent réunis au château de Moulinsart rebaptisé pour la circonstance Moulinserre. Ils sont venus fêter l’anniversaire de la Castafiore à l’invitation de Tintin. Mais que dis-je là ? En fait, le casting est composé

 de pseudos trouvés avec beaucoup de créativité et d’humour sous lesquels on reconnaît aisément chacun des protagonistes de l’œuvre d’Hergé. Vous identifierez aisément, sous les pseudos de Martin, du professeur Tournelune, du capitaine Paddock, des frères Durandt, de la Castraflore, du majordome Hector, du chien Pilou, et de bien d’autres, les figures emblématiques des albums de Tintin. Mais que voulez-vous, les ayant-droits du dessinateur ( Hervé dans le roman ) se montrant très pointilleux, il a bien fallu recourir à un subterfuge. Même l’image du château qui figure sur la couverture est ambigüe et s’appelle Moulinserre.  Au-delà de ce stratagème, ce qui est génial dans ce roman, c’est que l’auteur réussit à nous faire flotter entre réalité et fiction, une sorte de second degré très réussi, résultat d’une belle originalité, d’une grande créativité et, à l’évidence, d’un beau talent puisque le résultat est une parfaite réussite. Tous sont là pour l’anniversaire de la Castraflore mais la fête tourne vite au drame quand on découvre que la diva a été victime d’un meurtre dans sa chambre. On fait appel à la commissaire Satisfaction Cantono qui, assisté de ses deux adjoints et des inénarrables jumeaux Durandt, va enquêter en auditionnant tout ce beau monde. Tous ou presque ont une bonne raison d’en vouloir à la diva, même Martin. Les pistes et les suspects s’accumulent pour le plus grand plaisir du lecteur. C’est bien écrit, il n’y a pas de temps morts et on revisite agréablement l’œuvre d’Hergé. Je ne suis pas un tintinophile averti mais j’ai lu la plupart des albums de Tintin, ce qui m’a permis de naviguer sans trop de difficulté parmi ce réseau de références. C’est donc un polar réservé en priorité à celles et ceux qui ont lu tout ou partie des albums d’Hergé. C’est aussi une forme d’hommage à cette œuvre considérable et universelle, un hommage réalisé par un expert. J’ai vécu une plongée très agréable dans cet univers particulier. Laissez-vous tenter, vous ne serez pas déçus et cela vous donnera peut-être l’envie de redécouvrir l’œuvre d’Hergé.

Meurtres à Moulinserre, de Renaud Nattiez, éditions Sépia, mars 2021, 278 pages, 20 €.

 

 

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28 mars 2021 7 28 /03 /mars /2021 16:11

Si l’on en croit ceux qui la pratiquent, la chasse à courre est un art qui répond à un rituel immuable, un ensemble de règles.fondées sur le principe général selon lequel une meute ne lâche jamais sa proie. C’est sur cette allégorie qu’est construite l’intrigue du roman de Nicolas Lebel. Mais, ici, ce ne sont pas des animaux qui font l’objet de la traque, ce sont des êtres humains.

Rompant avec son personnage récurrent, l’inénarrable Mehrlicht, Nicolas Lebel met en scène un duo de policiers qui, dans un autre registre, valent le petit homme contrefait et mal embouché auquel le lecteur s’était habitué : un commissaire profondément humain mais en proie au doute, de surcroît affublé d’un patronyme qu’il doit assumer, Starski, et une lieutenante, Chen, qui est l’archétype de l’Asiatique froide, déterminée et procédurière, une sorte de James Bond girl qui est l’antithèse de son patron. Ce duo improbable doit affronter une série de meurtres  dont les policiers se rendent compte très vite qu’ils obéissent à un schéma analogue à celui des règles de la vénerie. Les têtes de chapitre reprennent les différentes étapes du rituel de cette forme de chasse que des tueurs ont choisie pour éliminer leurs victimes. Très vite, l’enquête s’oriente vers un règlement de compte lié à un fait survenu il y a déjà une vingtaine d’années : la politique de l’apartheid pratiquée en Afrique du Sud, pays d’où sont originaires les premières victimes. L’affaire se complique avec une lutte autour de gros enjeux dans l’industrie pharmaceutique.

La lucidité et la disponibilité du commissaire Paul Starski sont mises à mal par plusieurs évènements qui surviennent dans sa vie : l’agonie de son chien qui a été empoisonné, l’annonce faite par sa femme de son intention de divorcer.et le fait que la première suspecte soit une ancienne relation amoureuse. A contrario, la lieutenante Chen, lucide et procédurière, conserve une parfaite maîtrise d’elle-même, de ses sentiments et du cours des choses. C’est elle qui prend l’initiative et dirige les premières investigations, supportant tant bien que mal les états d’âme et les entorses à la procédure de son supérieur hiérarchique.

Le gibier est un polar passionnant qui, par moments, prend des airs de thrillers et va à cent à l’heure. Pas de temps morts ; à aucun moment, on ne s’ennuie. L’écriture est belle et le récit est truffé de passages humoristiques particulièrement réussis comme la description de la fourrière où se rendent les deux enquêteurs et qui m’a provoqué un fou rire. Avec cela, l’intrigue est brillamment construite et le dénouement est inattendu.

Avec ce nouvel opus, Nicolas Lebel m’aurait presque fait oublier Mehrlicht. C'est dire. C’est une très belle réussite.

Le gibier, de Nicolas Lebel, Editions du Masque, mars 2021, 389 pages, 21 € 90.

 

 

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14 février 2021 7 14 /02 /février /2021 19:59

Tout commence par un drame. Sur la côté méditerranéenne, un groupe d’enfants du pays s’amuse à descendre un ruisseau sur un radeau de fortune confectionné avec des palettes et des bidons. C’est le narrateur qui est à la barre lorsque, à l’endroit où le petit cours d’eau se jette dans la mer, le frêle esquif se disloque et deux des enfants sont emportés au large, Néné et sa sœur Albanie. Néné ne sait pas nager et disparaît irrémédiablement malgré les efforts désespérés de sa sœur pour le sauver. En apparence, ce drame ne fera pas exploser le petit groupe qui, l’adolescence puis l’âge adulte venus, maintiendra sa cohésion. Ils vivront des moments d’insouciance mais ils mettront aussi en œuvre des opérations de représailles contre ceux qui, avec leur argent, projettent de défigurer cette côte paradisiaque à laquelle ils sont viscéralement attachés. Les années vont passer jusqu’au jour où, longtemps après, dans un pays du Nord de l’Europe, le narrateur devenu agent commercial voit son passé resurgir de façon inattendue et violente. Beaucoup de choses ont changé et Léonard, dit Léo, en même temps qu’il renoue avec le pays de son enfance et avec ses amis d’antan, va se trouver pris dans un engrenage infernal dont les causes remontent à sa jeunesse.

Construite sur une alternance de récits situés à des époques différentes, cette intrigue passionnante est servie par une très belle écriture, moderne, originale, un style imagé qui fait défiler comme dans un kaléidoscope l’âme de cette côte méditerranéenne et la passion qu’elle suscite chez ceux qui y ont toujours vécu et qui lui vouent une passion sans bornes.

Ce roman n’est pas un polar au sens propre du terme mais il tient en haleine. En même temps, ce récit écrit par un enfant du pays, fait revivre un âge d’or altéré au fil du temps par le tourisme de masse et l’argent roi. Je me suis senti porté par cette fresque méditerranéenne et par cette histoire complexe alimentée de bout en bout par un suspense prenant. De ce récit, se dégage aussi une intéressante réflexion sur l’être humain et sa relation à l’autre.

Je vous recommande ce roman. Je suis sûr que, comme moi, vous aurez du mal à interrompre votre lecture.

Mare nostrum, de Olivier Arnaud, éditions Lajouanie, février 2020, 250 pages, 18 €.

 

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7 février 2021 7 07 /02 /février /2021 13:14

Voilà un roman que je ne parviens pas à enfermer dans la catégorie des polars tant il me paraît emprunter ses immenses qualités à plusieurs genres littéraires. J’avais trouvé son précédent roman, « Mortelle canicule », excellent. Sans hésitation, je qualifie celui-ci d’éblouissant. Une histoire magnifiquement construite et superbement écrite que j’ai lue d’une traite. On y retrouve le docteur Morland déjà présent dans « Mortelle canicule », exilé cette fois dans une des régions les plus inhospitalières du globe, surtout l’hiver, je veux parler de la Sibérie. Une région dans laquelle, malgré cela, à la suite d’un terrible drame, le docteur Morland, médecin légiste, a choisi de passer le reste de sa vie, loin des hommes, loin de tout et surtout loin de son passé. Dans une cabane de pêcheur éloignée de la civilisation, il pense avoir trouvé la sérénité. Mais la société des hommes le rattrape en la personne de deux duellistes qui viennent s’entretuer sous ses yeux. Et c’est le début des ennuis qui vont le précipiter entre les mains de la terrible police d’état russe puis, à la suite, dans un lieu d’où l’on ne revient jamais. Du moins, en principe. Ce roman est une forme de huis-clos dans lequel Morland affronte un univers impitoyable où la raison est celle du plus fort, où la vérité s’obtient par la force et où les valeurs humaines n’ont plus cours. Et, pourtant, étroitement et puissamment liés à l’histoire, s’offrent aux yeux du lecteur deux univers fascinants et presque en opposition : d’une part, celui de la terrible Sibérie où le danger et la mort rôdent en permanence et qui semble incapable de se défaire de son passé terrifiant et, d’autre part, celui de la culture russe dont le romancier, nourri aux mamelles de Dostoïevski, Tolstoï ou autres Gogol et Pouchkine, a parfaitement saisi l’âme et la restitue magnifiquement. Avec ses valeurs presque chevaleresques. Un pays paradoxal et étonnant en rupture avec notre culture et notre façon de penser d’Occidentaux.

 Le fait que Jean-François Pasques ait longuement séjourné en Sibérie explique pourquoi il fait de cette région une peinture très fidèle et de ses habitants, des personnages si vrais qu’on parvient à les voir. Au-delà de la terrible réalité que doit affronter Morland, on arrive quand même à entrevoir d’autres valeurs, celles au nom desquelles cette histoire s’achèvera sur une note d’espoir.

Pas de temps morts dans ce récit qui sait de bout en bout

tenir le lecteur en haleine. Pendant plus de deux cents pages, on fait corps avec Morland, on tremble avec lui, on souffre avec lui, on désespère comme lui puis, dans les soixante dernières pages, on se prend à espérer puis à rêver de plus en plus fort avec lui jusqu’au dénouement.

Un autre intérêt de ce roman réside dans la richesse et la clarté de l’information qu’il nous livre sur ce pays, sur son histoire récente et sur sa culture. Les notes qui figurent à la fin sont très intéressantes pour comprendre l’histoire de l’URSS et la direction impulsée par Valdimir Poutine à la Russie d’aujourd’hui. Sans jamais être nommé, Poutine est, en arrière-plan, un des personnages de ce roman.

Une lecture magnifique, une de mes plus belles et plus passionnantes depuis longtemps. Une vraie réussite et un immense coup de cœur. Chapeau à Jean-François Pasques. A lire absolument.

Le seul témoin, de Jean-François PASQUES, éditions Lajouanie, janvier 2021, 276 pages, 18 €.

 

 

 

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