"Car il y a plus dans le roman de Jean-Michel Lecocq que le nécessaire suspense", a écrit un collègue et ami, auteur de grand talent, après avoir lu Le squelette de Rimbaud. On ne pouvait me faire plus beau compliment. En écrivant cela, il évoque la dualité qui existe en littérature entre, d'un côté, les amateurs de polars trépidants dans lesquels les enquêteurs n'ont pas le temps de souffler et où les évènements se précipitent, en s'entrechoquant à chaque page, où seule compte l'enquête proprement dite menée rondement et, de l'autre, ceux qui préfèrent les intrigues menées selon le rythme paisible d'un enquêteur qui, comme l'écrivait un chroniqueur, baguenaude entre les crimes à la recherche d'indices, sonde les cœurs à la recherche de la vérité et fait goûter aux lecteurs, en même temps qu'il enquête, une multitude de saveurs dont les priverait une enquête menée à la hussarde. On m'a reproché quelquefois de ne pas conduire mes intrigues à cent à l'heure, de m'attarder à ménager des pauses pour faire découvrir aux lecteurs un tas d'à-côtés, d'arrière-plans, de chercher à donner à mes histoires de la profondeur. C'est précisément ce dont je tire une certaine fierté, celle de ne pas me contenter de dérouler une simple procédure judiciaire, de ne pas privilégier l'action en cascade mais d'écrire de véritables romans, comme le faisait, au XIXe siècle, un dénommé Emile Gaboriau dont les premiers cités n'aurait sans doute pas apprécié la littérature. Il me semble que la qualité de l'écriture trouve plus facilement son compte dans la seconde catégorie que dans la première. Moins moderne diront certains sans être véritablement certains de pouvoir définir ce qu'il entendent par là. Car, l'écriture d'un Simenon demeure étonnamment moderne. En cela, au risque de paraître prétentieux, je me reconnais une filiation avec ces grands écrivains, auteurs de romans policiers, que sont Gaboriau, Simenon ou encore Magnan. Et je pourrai en citer bien d'autres. Après, chacun est libre d'avoir ses préférences.