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8 novembre 2012 4 08 /11 /novembre /2012 20:27

Avec ce roman, c’est dans un labyrinthe vertigineux que nous entraîne Fred Vargas. A Paris et dans l’Eure, on a retrouvé les cadavres de deux femmes vraisemblablement assassinées. A Paris, deux mauvais garçons ont été eux aussi assassinés. Deux tombes ont été profanées. Une ombre a été aperçue dans le cimetière. Un curé dépressif détient un vieux livre qui traite de reliques et qui semble intéresser au plus haut point Adamsberg. Une infirmière psychopathe surgit de la mémoire du commissaire qui est convaincu qu’une troisième femme va être assassinée. Voilà les éléments de l’intrigue qui sont livrés, en vrac, épars, disparates, sans lien évident entre eux, mais notre commissaire s’obstine à suivre le fil invisible supposé les relier. Lui-même n’est pas sûr que ce fil existe ni que, dans l’hypothèse où il existerait, il relie bien les personnages et les faits sur lesquels il enquête. Il finirait même par douter de sa propre hypothèse mais Danglard est là pour le pousser à persévérer dans son idée : «  Non. Je pense que vous n’allez pas la laisser choir. Je pense que vous persisterez à la chercher ( la troisième femme ). Que les autres soient d’accord ou non ».

Comme dans « L’armée furieuse », on est confronté à un fond de surnaturel médiéval. En apparence, en tous cas. Ce serait même le mobile des meurtres. Une histoire de philtre qui conférerait l’immortalité ! Les hommes de sa brigade finissent par ne plus croire à son hypothèse et même Retancourt disparaît comme si elle ne voulait plus suivre Adamsberg dans sa quête improbable. Le tout est plus digressif et métaphorique que jamais. La relation des rapports entre Adamsberg et Veyrenc qui remontent à leur enfance pyrénéenne est une histoire dans l’histoire, autour de l’incontournable Camille. Comme toujours, Vargas extirpe de son imaginaire des personnages hauts en couleurs, hors normes, qui remplissent pour notre plus grand plaisir l’espace narratif. Labyrinthe, disais-je, dédale même dans lequel il faut se cramponner au fil d’Ariane pour suivre dans son cheminement tortueux un commissaire Adamsberg plus perturbé et plus fragile que jamais : « La disparition de Retancourt, le café nocturne avalé chez Romain, le tendre accouplement de Camille et Veyrenc, le vif des pucelles, la physionomie féroce de Roland avaient secoué la nuit d’Adamsberg ». Danglard vient à son secours, en résumant en une phrase la philosophie de ce polar hors normes : « L’hypothèse du De Reliquis (1) est aussi fragile qu’une vision. Elle tient sur un fil, mais ce fil existe. Et il relie tous les éléments les plus disparates de l’histoire. Il relie même cette histoire de semelles cirées et de dissociation. » Tous les ingrédients épars, disparates et bruts donnés d’entrée de jeu sont mis à bouillir dans une sorte de cornue telle une mixture dont Fred Vargas seule connaît la recette mais qui vous donne pour finir un élixir dont elle a le secret, c’est-à-dire un nectar incomparable que l’on déguste sans retenue, avec un plaisir infini.

(1)    Il s’agit du vieux livre que détient le curé et qui traite des reliques.

Dans les bois éternels, de Fred Vargas, J’ai lu, avril 2009, 478 pages.

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commentaires

E
Je viens de terminer l'oeuvre et je ne comprends pas que l'auteur ne se soit pas aperçu de son énorme incohérence: la mixture tant désirée netant pas complète puisqu'il manque le troisième vif à quoi sert de vouloir la boire?
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